Bang bang, ou presque.

Publié le par Lisa Dawn

[...]

° Je ne vais pas mal.
Non.
J'irai mal après l'onde de choc.
Quand la poussière sera retombée au sol.


Après la déflagration, c'est comme si une longue et paisible nuit s'achevait.
La lumière entre brutalement par l'interstice entre les paupières.
Mord la rétine.
Alors par réflexe, on retourne dans le noir.
IMG 3090
Les yeux fermés, on essaie de se souvenir.
Qui on est.
Où on est.
Quel jour on est.
Pourquoi on est là.

Une sensation dans le ventre, entre la peur et la nausée.
Tout revient, soudain, les pensées, les faits, les mots.

On espère de toutes ses forces qu'on se plante, que c'est moins grave que ce qu'on imagine.
Que tout continue comme avant.

On ouvre les yeux pour vérifier.
On ne reconnaît rien.
La lumière est trop forte. Trop crue.

Toutes les larmes sans raison
Toute la nuit dans ton miroir
La vie du plancher au plafond
Tu doutes de la terre et de ta tête
Dehors tout est mortel
Pourtant tout est dehors
Tu vivras de la vie d'ici
Et de l'espace misérable
Qui répond à tes gestes
Qui placarde tes mots
Sur un mur incompréhensible

Et qui donc pense à ton visage ?

II, Seconde nature, Paul Eluard.
Après la déflagration, on est sourd.
Sans oreilles, on ne le sait pas, mais on n'a plus aucun équilibre.
Plus de point de repère.

Je ne vais pas mal.
Non.
Pas encore.
J'irai mal quand je recommencerai à écouter de la musique, parce que chaque note me sortira du confort assourdissant du silence.
J'irai mal quand je ferai la liste de ce qui n'existera plus, de ce qui ne se produira pas.

Après la déflagration, il faut un peu de temps avant que les lignes, le sol, les gens, les sens se rétablissent.
Puis les gravats apparaissent.
C'est là, oui, qu'on va mal.


Je ne vais pas mal.
Ou presque. °


[...]

Publié dans Presque pas mal

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